Du 15 au 30 novembre se déroulait la biennale de design de St-Étienne ( site). Une édition qui faisait la part belle au graphisme avec sa section N-1, constituée de projets d’étudiants ou de diplômés récents. « N-1 » pour évoquer – je cite – les notions de retrait et de soustraction, les participants provenant « d’écoles d’art, c’est à dire de lieux d’enseignement et de recherche soustraits aux règles et aux impératifs du marché et de la commande. » Les écoles comme derniers espaces de libre créativité ?
À l’origine d’une sélection basée – paraît-il – sur les thèmes de la transcription / traduction et de l’hybridation : E. TIBLOUX, directeur de l’ESADSE, et J-M COURANT (alias Regular) – professeur itinérant bien connu à l’ESAC de Pau. Concrètement, on pouvait y voir beaucoup de tentatives intéressantes pour organiser / présenter visuellement des données, ou pour innover en matière de typographie (ma sélection).
Un petit mot à propos de l’astucieuse identité de l’exposition elle-même, signée d’une étudiante stéphanoise : Aurore CHASSÉ.
Les affiches étaient obtenues en appliquant un deuxième passage à l’encre rouge sur les feuilles ayant servi à l’impression des cartels, eux-même remarquablement sobres et appropriés. Elles pouvaient de plus se connecter entre elles selon un principe mis au point par la demoiselle en cours d’études.
Une forme de motif graphique, extensible à l’infini, semblable à celui imaginé par Base Design lors de l’expo La force de l’art au grand palais en 2006.
Présentation non-exhaustive de quelques unes des plus réalisations les plus intéressantes :
Simon HAFENBRADL, Ich bin Meins, 2008. Cet étudiant à la Darmstadt Hochschule (sciences) a entrepris le recensement de la totalité des objets présents dans sa simple chambre d’étudiant. Un volume de texte déjà impressionant qui provoque de prime abord l’incrédulité. « Il s’agit de susciter une réflexion critique sur nos comportements de consommateurs et notre relation aux marques ».
Une installation très appréciée du public. « Le temps passe, et chaque fois que du temps passe, quelque chose s’efface », une citation de Jules ROMAIN formée au mur par les aiguilles de plus de 500 horloges en mouvement, lisible de façon optimale à midi uniquement. La photo ci-dessus a été prise à midi vingt, et avec un peu d’imagination on peut encore déchiffrer les mots (le temps /et chaque f /du temps).
Sa créatrice, Nadine GRENIER, avait-elle connaissance de cette œuvre de Christiaan POSTMA, ou s’agit-il d’une simple coïncidence ?
Too much pensez-vous ? Allons, juste une typographie bling-bling bien de son époque. Un exercice de style qui n’est pas sans rappeler une fonte ancienne de Fabrizio SCHIAVI : FF Mode.
La typographie Encore de Clément NEYRET LE TULLE, très pop, sur laquelle je n’ai guère plus d’info, sinon qu’il s’agit d’un projet en développement.
Certes, ces photos sont nazes (la faute à une scénographie exigüe, plongée dans la pénombre), mais il est possible de découvrir plus avant ce magnifique projet de Mathieu MERMILLON qui tente ici d’opérer une réhabilitation de l’italique, « parent pauvre de la typographie ». « Sans nier les vertus du romain, je défends un italique. » avec succès, a-t-on envie d’ajouter.
Phrase entendue plus d’une fois dans les couloirs de la biennale. « Vous avez vu le chien ? ».
Par « le chien », il fallait entendre le projet Réservoir Dogs de Charles MAZÉ, visible depuis quelques temps déjà en ligne sur le site de l’atelier Écrire en grand animé par Pierre di SCIULLO à l’ESAD de Strasbourg (parmi d’autres travaux tout aussi intéressants).
Images, vidéo, et explications sont en ligne sur le site de l’ESAD de Strasbourg, aux côtés de plusieurs autres travaux tout aussi intéressants.
Claire MOREL (Le Quai, Mulhouse) projet judicieusement intitulé Sans Titre. « Le texte ne transparaît plus qu’à travers sa dimension strictement visuelle. La trame permet alors d’accéder directement à l’espace visuel qu’est la page, puis le livre. Tous les éléments qui n’apparaissent ordinairement que secondaires viennent au premier plan et définissent l’objet imprimé : spatialisation du texte, gris typographique, structuration et respiration de la page. »
Saisi au passage dans la rue : l’éclair blanc d’un tramway relooké de pied en cap par un étudiant en design du cru.
Collaboration réussie entre la société de tramways locale et l’ École Supérieure d’Art et Design si je comprend bien. Je n’ai pas plus d’info, juste le nom du professeur responsable de l’atelier : Laure LAGANNIER (graphiste). Si jamais quelqu’un a pu en savoir davantage…
D’autres projets présenté à la biennale mériteraient un développement plus approfondi. J’y reviendrai peut-être tantôt.